Le commerce ambulant au Burundi est une activité informelle. Notre collègue Kelvin Ndihokubwayo braque les projecteurs sur l’organisation de ce commerce au Burundi, et tente d’analyser s’il est source d’une concurrence loyale ou déloyale avec les commerçants œuvrant dans le formel. Analyse.

Au premier abord, l’enregistrement dans les registres administratifs avec disposition de livre de commerce et du registre d’identification fiscale, la comptabilité bien tenue, les impôts payés, la déclaration des salaires auprès des services de l’Etat, sont des critères pouvant servir d’instrument aux classements des activités selon qu’elles sont du secteur formel ou informel.

En se référant à la loi nº1/01 du janvier 2015 portant code de commerce, que ce soit formel ou informel, le Burundi reconnaît la liberté du commerce qui comporte la liberté d’entreprendre conférant pour toute personne physique ou morale de se livrer à l’activité commerciale, la liberté d’exploiter qui confère le droit pour tout commerçant de conduire ses affaires comme il l’entend en se conformant à la loi, ainsi que le droit d’utiliser tous les moyens loyaux pour attirer la clientèle.

Pour le cas du commerce ambulant, malgré cette loi, le commerce est informel. Les vendeurs ambulants appartiennent à une catégorie de travailleurs extrêmement visible qui ont toujours existé malgré les efforts fréquents visant à les faire disparaître. La plupart des acteurs du commerce ambulant sont des gens sans un capital consistant. C’est souvent un capital de 10 000 Fbu, 20 000 Fbu, voire 50 000 Fbu. Avec un accès difficile aux crédits pour financer leurs commerces, ils sont obligés de minimiser leurs coûts en faisant le commerce sans une adresse fixe, afin de gagner la contrepartie du loyer, de l’électricité, de l’eau, du veilleur, des impôts et taxes, etc.

Concurrence déloyale ou pas ?

L’objectif des droits de la concurrence est de garantir les conditions de concurrence juste et équitable à tous les acteurs du marché. Pour Emmanuel Nzinahora, un commerçant formel au marché de Kinindo, « la prolifération du commerce ambulant commerce favorise la précarité sur le marché de l’emploi, exerce une concurrence déloyale vis-à-vis du secteur formel et pénalise l’économie nationale, avec un manque à gagner en matière de recettes fiscales ». Il explique ces propos par la loi nº1/06 du 25 mars 2010 portant régime juridique de la concurrence qui définit la concurrence déloyale comme étant « tout agissement non-conforme aux usages d’une profession commerciale ou non, tendant à attirer la clientèle ou à la détourner d’un concurrent ».

Il renchérit que le commerce ambulant n’est pas exclusivement caractérisé par la situation du vendeur, mais aussi par celle du client qui achète, voire consomme dans un espace de circulation au cours de ses déplacements. « Cela fait que ce sont les commerçants ambulants qui trouvent plus des clients dans leurs mobilités, plus que nous les commerçants formels, créant une situation de concurrence déloyale ».

Que faire ?

La Tanzanie peut servir d’exemple au Burundi. À Dar-es-Salam, les vendeurs ambulants tanzaniens reçoivent des licences et sont autorisés à travailler depuis le début des années 1990. Les étagères et les tables ont été normalisées et des lignes directrices fixant un cadre de gestion du commerce ambulant ont été adoptées. Le Conseil municipal a été convaincu d’adopter une approche consultative qui a fortement contribué à la mise en œuvre du plan et résolut de nombreux problèmes tels que la criminalité et la propreté des rues.

Le statut juridique du commerce ambulant manque de clarté. Il est considéré comme illégal en vertu d’une loi, alors qu’une autre demande spécifiquement aux vendeurs ambulants de payer des taxes à la Mairie. La loi doit donc présenter des termes clairement définis et toute réglementation inadaptée doit être abrogée. Les lois ne doivent pas chercher à exclure les vendeurs ambulants ou à rendre leurs activités illégales ou criminelles, mais plutôt à établir des procédures leur permettant d’obtenir des autorisations.

Sans être tenant de l’informel, il faut tenir compte du pourquoi le commerce ambulant est informel, et la solution est simple, il faut formaliser le commerce ambulant au Burundi par une politique nationale ordonnée et mise en application pour concilier les deux parties.