Avec un taux de bancarisation de 4 % en RDC, 23 % au Rwanda et 21,92 % au Burundi, l’accès aux banques et services financiers reste précaire dans la région des grands lacs. Pour le blogueur Franck-Arnaud Ndorukwigira, cette précarité, due aux barrières de création des comptes bancaires, profite aux tontines, un système financier informel, qu’il faut à tout prix formaliser.

Servant à la fois de crédit à la consommation, de banque aux petites et moyennes entreprises, de caisse d’épargne voire de sécurité sociale, les tontines occupent une place importante dans l’économie des pays de la région des grands lacs.

La tontine est un regroupement de personnes qui décident d’un commun accord de contribuer périodiquement une somme déterminée à une caisse commune. Les fonds récoltés sont remis à tour de rôle à chacun des membres du groupe qui dispose ainsi d’une somme importante.  Celle-ci peut lui permettre de faire un investissement destiné à l’amélioration de ses revenus.

Raccourci informel

Les tontines sont devenues de nos jours incontournables. Au Burundi, selon le rapport d’enquête sur l’offre des services financiers formels, on notait en 2015 une diminution de 6,71 % des comptes de dépôts des clients membres d’association par rapport à 2014 tandis que ces comptes avaient exponentiellement augmenté de 264 % de 2013 à 2014.

Au Rwanda, ils sont près de 42% à recourir aux tontines pour financer leurs petits projets, contre 19% en 2012, selon la Banque Nationale du Rwanda.

Victor, est un boulanger congolais. Il est souscrit dans une tontine « Likelemba » d’une cinquantaine de personnes à Uvira. Pour lui, les barrières à l’ouverture d’un compte bancaire sont légions : «Un compte en banque est un luxe dans notre région des grands lacs vu les frais enduits, l’éloignement des guichets et agences, la lourdeur des démarches administratives et les exigences de l’hypothèque pour bénéficier un crédit… sont des obstacles».

Toutes ces entraves, selon Victor, favorisent les tontines, qui sont perçues comme des pneus de secours : « Je privilégie la tontine pour financer mes initiatives et ça me coûte moins cher que de recourir aux banques. Je n’ai pas besoin de risquer mes biens personnels».

La formalisation est une nécessité

Se priver d’un compte bancaire, ça revient à s’exclure du système financier formel. Or, du fait du caractère informel des placements, les tontines ne sont pas reconnues par l’administration fiscale et constituent alors, un frein au développement.

Les associations de tontines devraient placer leurs produits dans les banques formelles. Un compte bancaire implique la sécurisation de ses avoirs. En plus, il y a une transparence et une clarté dans la gestion des opérations plus que dans une tontine. Autant de raisons de formaliser les tontines.

Les décideurs dans notre région des grands lacs devraient voter des lois allégeant les exigences à l’ouverture d’un compte bancaire comme le démontre la campagne Birashoboka du Centre for Development and Entreprises Great Lakes.  De leur côté, les banques devraient faciliter l’ouverture d’un compte en créant par exemple l’ouverture des comptes bancaires en ligne, ou le mobile banking, qui requiert que quelques minutes du temps, des frais réduits et une meilleure proximité et  rentabilité.